Samedi 6 novembre 2010
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TXA : La médecine redécouvre un vieux traitement antihémorragique

Un intérêt subit pour le TXA a submergé la presse quotidienne. Cet intérêt subit pour le TXA, l’acide tranexamique, est lié à la publication dans la revue médicale anglaise, The Lancet, d’une extension d’utilisation de ce médicament dans des indications pour l’instant non validées, les hémorragies liées à un traumatisme.

Qu’est-ce que ce TXA? Contrairement à ce qu’écrit le Figaro dans son édition online, l’acide tranexamique n’est pas une molécule “qui prévient la formation de caillots de sang” , mais bien une molécule qui évite la dissolution de ce caillot. C’est ce que l’on appelle un antifibrinolytique. Il bloque la formation de plasmine. Il peut donc éviter que des hémorragies puissent survenir.

Jusqu’alors ce médicament était utilisé pour prévenir les hémorragies lors d’extractions dentaires, par exemple chez les hémophiles, plus rarement pour limiter les hémorragies menstruelles trop importantes, ou encore au cours de chirurgies orthopédiques. Les indications diffèrent en fonction des pays et du nom commercial du produit. L’idée d’utiliser ce produit dans d’autres indications serait venue aux auteurs constatant le nombre important de patients décédés des suites d’une hémorragie brutale, par exemple lors d’un accident de la route. L’étude a d’ailleurs été baptisée CRASH.

Des traumatismes importants ou certaines chirugies peuvent malheureusement conduire à des hémorragies massives souvent mortelles. Un agent anti-fibrinolytique pourrait dans ces situations avoir un intérêt. Une métaanalyse regroupant 3836 patients montrait que l’acide tranexanique réduisait le besoin de transfusions de 30%. L’acide transeexanique serait ainsi peut-être capable de réduire la mortalité chez des patients ayant subi un traumatisme. Vérifier cela était bien le but de l’étude CRASH-2 : évaluer l’effet de l’injection précoce d’acide tranexanique sur la mortalité, les occlusions vasculaires et la nécessité de transfusion sanguine chez des patients ayant ou étant à risque d’hémorragie massive.

L’étude a été mené grâce à la collaboration de 274 hôpitaux localisés dans 40 pays à travers le monde. Les médecins participants à l’étude ont ainsi injecté à des adultes présentant une hémorragie importante ou chez qui cette hémorragie était pressentie, le TXA ou un placebo, afin de pouvoir certifier son efficacité. A la fin de l’étude, 10 060 avaient reçu du TXA et 10067 un placebo.

L’injection de TXA a réduit la mortalité totale de 9% avec 1453 décès dans le groupe TXA contre 1613 dans le groupe placebo soit 160 survies supplémentaires pour 10 000 patients traités. Le risque de mortalité par saignement était également réduit de 15% avec 489 décès dans le groupe TXA contre 574 dans le groupe placebo. En plus, il n’y a eu que 33 décès dans le groupe TXA et 48 dans le groupe placebo du fait d’occlusions vasculaires. Il n’y a pas eu de différence de besoin de transfusion entre les deux groupes.

Cependant, parmi les patients ayant reçu du TXA, 3453 étaient déclarés morts ou dépendant à la sortie de l’hôpital ou au bout des 28 jours contre 3562 dans le groupe placebo, montrant finalement une absence de différence significative sur ce critère de plus long terme entre le TXA et le placebo. L’effet bénéfique se gomme donc assez rapidement.

Il est également important de noter que la majorité des patients on reçu, en plus du TXA, un produit supplémentaire appelé facteur recombinant VIIa. Seul 17 patients ne l’ont as reçu sur l’ensemble des patients inclus.

Le TXA, s’il peut effectivement se révéler utile en cas d’hémorragie majeure, n’est cependant pas la panacée à tous les traumatismes et tous les saignements survenants à travers le monde. La presse généraliste est donc bien rapide lorsqu’elle titre “Un médicament anti-hémorragie pourrait sauver des milliers de vie”, oubliant que ce ne serait à priori que pour une durée brève selon les connaissances actuelles, ou encore que “Ce médicament pourrait aussi servir à réduire les hémorragies du post-partum qui tuent environ 100 000 femmes par an dans le monde” (Le Monde) alors que le produit n’a jamais été testé dans cette indication…

Le faible coût du traitement est également mis en avant par la presse, 4,5 dollars par gramme, auquel il faudra cependant ne pas oublier de rajouter le prix de l’injection du facteur VIIa, un dérivé du sang loin d’être gratuit. Le TXA n’est plus sous brevet et ne coûte presque rien, certes, mais alors qui investira des centaines de millions d’euros pour un développement clinique qui permettrait d’obtenir une indication nouvelle telle que l’utilisation dans les hémorragies du post-partum? Personne probablement. Il y a donc peut de chance qu’une suite soit donnée à cette étude, malheureusement.

Source

Effects of tranexamic acid on death, vascular occlusive events, and blood transfusion in trauma patients with significant haemorrhage (CRASH-2): a randomised, placebo-controlled trial
CRASH-2 trial collaborators
The Lancet Published Online June 15, 2010 DOI:10.1016/S0140-6736(10)60835-5

Crédit Photo Creative Commons by  DG Jones

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