La prévention des pathologies non infectieuses et au premier rang, la prévention des maladies cardiovasculaires est une option efficace comme l’explique un bref article publié dans le Lancet. Une question qui peut se poser est la rapidité avec laquelle la réduction des facteurs de risque cardiovasculaires se transforme en bénéfice pour une population à risque ? En fait, il est à tord souvent imaginé que cela prend des dizaines d’années. Par exemple une baisse de mortalité peut-être visible au sein d’une population après arrêt du tabac en seulement quelques mois, et en 1 à 3 ans pour une modification des habitudes alimentaires.
L’exemple de la communauté de Montana, une petite ville américaine est éloquent. Après la mise en place d’une législation locale antitabac, les admissions pour événements coronariens aigus ont diminué de 40% à l’hôpital local en seulement 6 mois. Une législation équivalente en Ecosse a permis de réduire de 17% les admissions à l’hôpital et de 6% la mortalité en moins de 6 mois.
A Cuba, la production de produits alimentaire s’est brutalement réduite de 80% à la chute de l’URSS en 1991. Une crise économique sévère a frappé le pays entra 1991 et 1995. L’apport calorique par tête s’est réduit de 36%. Les transports en commun étaient immobilisés et la proportion de la population physiquement active est passée de 30% à 67%. Le poids moyen des cubains s’est réduit. Dans l’année suivant le début de cette crise, la mortalité coronaire s’est réduite de 39%. Ainsi, réduire les facteurs de risque a potentiellement un impact important sur les populations. Une baisse de la mortalité en combattant ces facteurs de risque peut survenir rapidement. Une politique des santé publique qui entraîne un changement profond au sein d’une population à risque a donc des répercussions efficaces et est souvent économiquement favorable conclue l’auteur de cette lettre au Lancet.
Il est intéressant de mettre en perspective cette opinion publiée dans le Lancet le 16 mars 2011 avec la récente décision gouvernementale de ne plus considérer l’hypertension artérielle, un facteur de risque reconnu de maladie cardiovasculaire, qui ne disparaît jamais et demande un traitement à vie, comme une affection de longue durée (ALD). Cette décision a été prise sous prétexte que l’HTA sévère était la “seule ALD à constituer un facteur de risque et non une pathologie avérée”.
Les patients nouvellement diagnostiqués devront donc s’acquitter du ticket modérateur. Evidemment, cette suppression ne l’ALD n°12 n’a pas pour objet de mieux traiter les patients mais uniquement d’économiser 20 millions d’euros par ans. 35% des patients traités en France pour une hypertension bénéficiaient d’une ALD. Economiser, croit-on ? En fait, si les patients souffrant d ‘une HTA sévère se traitent moins bien, et on estime que 25% d’entre eux seront incapables d’assumer la nouvelle charge financière, ce ne sont plus des antihypertenseurs que devra payer la société mais des hospitalisations pour accident coronaire aigu, ce qui fera vite fondre les 20 millions d’euros d’économie. En France le nombre de patients hypertendus contrôlés par leur traitement est seulement de 50% dans les meilleures estimations. Cette décision de Xavier Bertrand ne va pas améliorer la santé des hypertendus ni le portefeuille des français.
Source
Rapid Mortality falls after risk-factor changes in populations
Simon Capewell, Martin O’Flaherty
The Lancet March 1-, 2011
DECRET
Décret n° 2011-726 du 24 juin 2011 supprimant l’hypertension artérielle sévère de la liste des affections ouvrant droit à la suppression de la participation de l’assuré mentionnée au 3° de l’article L. 322-3 du code de la sécurité sociale
JORF n°0147 du 26 juin 2011 page 10873
texte n° 9
Crédit Photo Creative Commons by michelbarnier
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