jeudi 9 février 2017

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La consommation d’un aliment en boite de conserve augmente le taux de Bisphénol A de 1200%

Une nouvelle étude menée chez l’homme démontre que la consommation régulière d’aliments contenus dans une boite de conserve, en l’occurrence ici de la soupe, expose à une augmentation de l’exposition de l’homme au bisphénol A. L’étude a été menée par des scientifiques de Harvard et est publiée dans la grande revue médicale JAMA.

Le bisphénol A est un perturbateur endocrinien pouvant altérer la santé humaine. Sa présence a été liée à la survenue de diabète, d’obésité et de maladies cardiovasculaire. Son action oestrogène-like pourrait jouer un rôle dans la survenue de certains cancers et interférer dans le développement reproducteur humain et animal. On retrouve le bisphénol A dans de nombreux contenant alimentaires ce qui a récemment conduit à un vote de l’assemblée nationale en faveur de son retrait total, même si les industriels résistent. Si le bisphénol A a dorénavant pollué l’ensemble de l’écosystème, la principale source de contamination humaine reste l’alimentation. Dans les boites de conserve, il est utilisé dans la constitution du film plastique recouvrant l’intérieur de la boite de conserve. Toutes les boites de conserve contiennent donc du bisphénol A actuellement.

Les scientifiques ont recruté 75 personnes, qu’ils ont répartis en 2 groupes. Un groupe consommait pendant 5 jours une soupe en boite et l’autre groupe une soupe de légumes frais. Après 5 jours les groupes inversaient leur consommation. Le bisphénol A était dosé à plusieurs reprises au début, au cours, et à la fin de l’expérimentation

Les analyses des échantillons urinaires démontrent que le taux de bisphénol A est multiplié par 1200% par la simple consommation d’une soupe en boite de conserve au lieu d’une soupe de légumes frais.

“Des études précédentes avaient lié le bisphénol A à la survenue d’effets délétères pour la santé humaine. L’étape suivante est de déterminer comment les gens sont exposés au bisphénol A. Nous avons appris il y a peu que boire des liquides en bouteilles de plastique accroit le taux de bisphénol A dans l’organisme. Cette étude suggère que les aliments stockés dans des boites de métal recouvert de bisphénol A sont encore plus dangereux, surtout de fait de leur très grande diffusion” explique Jenny Carwile, auteur de l’étude.

“La magnitude de l’augmentation de bisphénol urinaire, observée dès la consommation de la première soupe, était totalement inattendue, et doit faire réfléchir ceux qui consomment régulièrement de la nourriture en boite ou des liquides en cannettes. Les industriels devraient éliminer ce bisphénol de leurs produits” ajoutait  Karin Michels, Professeur dans le service d’épidémiologie de Harvard.

Cette étude est d’autant plus intéressante après la position prise par l’académie de médecine en France au sujet du retrait du bisphénol A des contenants alimentaires. En effet, l’académie de médecine reconnait dans son rapport que Les “données convergentes sont en faveur d’un effet co-carcinogène du BPA possible voire probable dans l’espèce humaine, surtout dans les fenêtres d’exposition pré et péri natales et chez les sujets qui n’auraient pas la capacité de métaboliser le BPA notamment par conjugaison.(..) On peut donc conclure qu’il existe un faisceau suffisant de données convergentes montrant chez les rongeurs un effet co-carcinogène du BPA à des doses très inférieures aux doses journalières admises chez l’homme.

Et si “les résultats des études convergentes sur les plastiques et agents plastifiants, associés à leurs autres effets délétères sur la santé, également très étudiés par ailleurs (reproduction, diabète type 2, obésité, toxicité neuro-endocrinienne et comportementale) indiquent que nous sommes, pour le BPA et les phtalates dans une période transitoire d’incertitude relative, et nous autorisent à appliquer dès maintenant des mesures raisonnables de précaution.(Académie des technologies 2011, Gee 2009, 2010).

Pour l’académie de médecine, ces mesures raisonnables de précaution seraient par exemple :
- d’interdire de chauffer directement les aliments dans les emballages plastiques (fours à micro ondes et collectivités cantines, cliniques etc),
- d’interdire de stocker longtemps et à température élevée les eaux minérales dans les bouteilles plastiques libérant des phtalates,
– de ne pas recycler les emballages contenant BPA ou phtalates lors d’un tri sélectif (Eco-emballage),
- de conseiller aux caissières manipulant des tickets de caisse thermiques de porter des gants, surtout si elles sont enceintes,
- de diminuer quand cela est possible l’utilisation des emballages plastiques contenant BPA ou phtalates qui exposent les enfants, polluent l’environnement et augmentent le volume des déchets,
- de remplacer progressivement les bouteilles plastiques contenant BPA ou phtalates et qui peuvent libérer plus de produits à activité oestrogénique que l’eau de distribution publique dans les pays industrialisés (Les bouteilles en verre recyclables ont démontré leur innocuité pour la santé), – d’interdire les sachets et jouets en plastique contenant BPA et phtalates pour les jeunes enfants.

A ce jour aucune de ces propositions de l’académie de médecine ne sont appliquées ou n’ont même été soumises à débat alors que le bisphénol A continue d’être largement produit et ingéré par les être humains avant de continuer à être rejeté dans l’écosystème. Si les politiques restent muets, qui fera bouger les industriels?

Source

Canned Soup Consumption and Urinary Bisphenol A: A Randomized Crossover Trial
Jenny L. Carwile, Xiaoyun Ye, Xiaoliu Zhou, Antonia M. Calafat, Karin B. Michels
JAMA. 2011;306(20):2218-2220.doi:10.1001/jama.2011.1721

Perturbateurs Endocriniens (PEs) de l’environnement Mécanismes et risques potentiels en cancérologie
Académie de Médecine
Henri Rochefort, Pierre Jouannet

Crédit Photo Creative Commons by Mr. T in DC

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