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Génériques : quand un somnifère remplace un diurétique, les patients meurent et la sécu économise 0,74 €

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Vendredi 8 juin, le communiqué de l’ANSM était laconique et l’information a été reprise par la presse sans grand enthousiasme. Elle avait pourtant de quoi inquiéter : des patients ont effectivement constaté, suite à la prise de ce qui devait être le générique d’un diurétique, le furosémide, des somnolences. Les patients en ont parlé à leur pharmacien qui a remonté l’information. Nous n’avons pas d’indication sur la date de la première plainte d’une patiente ni sur la rapidité d’action du pharmacien ou du laboratoire TEVA, vendeur du produit falsifié.

Ce laboratoire indique dans un communiqué que les somnolences sont liées à “une erreur de conditonnement”, puisqu’un somnifère, la zopiclone a été substitué par erreur au diurétique, le furosémide. L’information n’est pas plus commentée par la presse, pas plus d’ailleurs par l’ANSM. Elle a pourtant son importance, car seuls des problèmes majeurs de suivi et de contrôle de la production pharmaceutique d’une usine peuvent expliquer une telle erreur. Les Bonnes Pratiques de Fabrication (BPF) qui définissent  précisément les standards de sécurité et  de qualité, qui sont appliqués à la totalité d’une chaîne de production, à l’usine, aux machines, aux équipements, et aux personnels, n’ont pas été respectées. Ceci devrait déclencher une enquête immédiate de l’usine, un arrêt de toute importation des produits pharmaceutique sortant de cette usine et un rappel global de sa production car une telle erreur est si grave qu’elle n’est probablement pas unique. Rien n’était pourtant mis en place par l’ANSM à part un rappel de lot.

Car, à l’heure actuelle, près de 200 000 boites sont concernées : 200 000 boites marquées “Furosémide TEVA 40 mg” ont été remplies avec un somnifère sans qu’aucun personnel de l’usine ne s’en aperçoive ? Personne ne trouva curieux que 6 millions de comprimés d’un somnifère disparaissent sans laisser de trace. Toute la chaine de production de l’usine a failli ainsi que la chaine de contrôle, sans compter celle de l’ANSM. 

Le furosémide est un diurétique : il est vital dans certaines maladies comme l’insuffisance cardiaque où il évite la survenue d’un oedême pulmonaire. Il est possible que des victimes de cette erreur massive soient à déplorer, tuées par le générique.

C’est peut-être ce qui est déjà arrivé à un homme de 92 ans habitant le 7ème arrondissement de Marseille décédé des suites d’un œdème pulmonaire et chez qui ont été découvert les emballages entamés du faux furosémide produit par le laboratoire Teva. Car non seulement le zolpidem n’est pas un diurétique et n’empêche pas l’aggravation progressive de l’oedeme dans l’insuffisance cardiaque dont souffrait vraisemblablement cet homme, mais ses effets de somnifères peuvent même aggarver et précipiter la maladie. L’enquète le confirmera.

L’enquête devra ensuite s’intéresser à la rapidité de réaction de l’ANSM et aux moyens mis en oeuvre par cette dernière car plus qu’un simple rappel de lot par voie de communiqué de presse, il aurait été urgent de prendre contact IMMEDIATEMENT avec tous les patients qui ont reçu le faux furosémide pour les avertir, remplacer leur traitement et les amener à consulter rapidement un médecin : en effet le cas du patient insuffisant cardiaque marseillais n’est probablement pas isolé et la non prise d’un diurétique efficace pendant quelques jours peut amener à une décompensation progressive qui obligerait à augmenter les doses de diurétiques de manière temporaire. Mais cela relève d’une décision médicale. A combien de personnes, la mauvaise prise de décision de l’ANSM et sa lenteur de réaction couteront-elles la vie?

Si la ministre de la Santé, Marisol Touraine, a annoncé qu’une enquête allait être menée lundi dans l’usine Teva, située à Sens, elle s’est aussi félicité que la “chaîne d’alerte mise en place ait bien fonctionné”, un propos hallucinant quand on voit que rien n’a fonctionné, et qu’une victime est probablement à déplorer. Un propos qui fera plaisir à la famille du patient décédé et qui veut en fait éviter toute mise en accusation de la politique du générique. Cette brillante politique générique coûte donc une vie de plus pour une économie mensuelle de 0,74 centimes d’euros : Le Furosémide TEVA dosé à 40 mg, incriminé dans cette affaire, est vendu 2,77 € la boite alors que le produit original, le Lasilix 40 mg coute actuellement  3,41 €, soit une différence par mois de traitement de 0,74 €.

Source

FUROSEMIDE TEVA 40 mg : l’ANSM actualise son information suite à la médiatisation d’un décès d’un patient prenant ce traitement et confirme le rappel de deux lots Y175 et Y176 – Point d’information

09/06/2013
 Crédit Photo Creative Commons by  SpaceShoe [Learning to live with the crisis]

 

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