Aux Etats-Unis, l’obésité est désormais une maladie

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Le mois dernier, l‘American Medical Association a reconnu l’obésité comme une maladie à part entière, dans l’espoir, explique t-elle, d’améliorer la lutte contre les maladies cardiovasculaires et le diabète de type 2. Cette décision, venant de l’association médicale Américaine regroupant le plus de médecins et étant par là même la plus puissante, n’est absolument pas anodine : un obèse étant un malade, l’objectif est qu’un médecin prenne en charge cette pathologie et ne se contente pas d’un vague conseil de perte de poids. Cela ouvre aussi la voie à une utilisation plus large des médicaments destinés à lutter contre l’obésité : jusqu’alors leurs restrictions d’utilisation, liées à des effets secondaires jugés trop importants pour une » non-maladie », ou leur non prise en charge par les assurances et en particulier le Medicare, nuisaient à leur expansion commerciale.

Toutefois, selon les opposants à cette nouvelle définition de l’obésité, cela revient à déclarer qu’au moins un tiers des américains sont des malades qui s’ignorent. Cette décision de l’American Medical Association est cependant partagée par de nombreuses autres associations médicales Américaines comme l’American Association of Clinical Endocrinologists, et le puissant et reconnu American College of Cardiology.

« Dire que l’obésité n’est pas une maladie mais plutôt une conséquence d’un choix de vie caractérisé par une suralimentation et une inactivité physique est équivalent à dire que le cancer du poumon n’est pas une maladie car elle a été provoquée par le choix individuel de fumer des cigarettes, » justifie encore la résolution de l’American Medical Association.

D’ailleurs, une étude publiée dans la revue Science vient opportunément démontrer que l’obésité peut être uniquement consécutive à une anomalie génétique alors même que les apports alimentaires ne sont pas excessifs. Des endocrinologues du Boston Children’s Hospital ont nourri deux groupes de souris avec exactement les mêmes apports caloriques. Mais un des deux groupes de souris avaient subi préalablement une délétion du gène MRAP2, qui exprime dans le cerveau des récepteurs à la mélanocortine 2. Ces souris sont rapidement devenues obèses au contraire du groupe sans anomalie du gène MRAP2. MRAP2 interagit directement avec les récepteurs de la mélanocortine 4 (MC4R), une protéine précédemment impliquée dans l’obésité chez les mammifères. MRAP2 améliore la production de mélanocortine 4, ce qui suggère que les altérations de signalisation liée au récepteur MC4R ne sont qu’un mécanisme sous-jacent de l’association entre la perturbation de l’activité du gène MRAP2 et l’obésité.

Or, au cours d’études génétiques sur des enfants souffrant d’obésité précoce et grave, des scientifiques de l’université de Cambridge avaient identifié quatre variants génétiques rares au niveau du gène MRAP2, suggérant  donc que ce gène peut également contribuer à la régulation du poids corporel chez les humains.

Cette découverte, sans remettre en cause le lien entre excès de nourriture hypercalorique et obésité, pourrait expliquer pourquoi tous les être humains ne sont pas égaux face à l’alimentation. Elle suggère qu’une partie de l’épidémie d’obésité réside dans les gènes, en tout cas pour certains, ces mutations restant pour l’instant rarement retrouvées.

Une meilleure compréhension de l’action de ce gène sur le cerveau pourrait aboutir à de nouvelles voies thérapeutiques de l’obésité. Les scientifiques ont montré que les souris ayant subi une atteinte du gène MRAP2 pouvaient conserver un poids normal mais uniquement en ayant une ration alimentaire calorique réduite de 15% par rapport aux souris sans anomalie du gène.

Ainsi la théorie classique qui voudrait qu’une calorie soit une calorie et que 3500 calories absorbées correspondent à 450 grammes de prise de poids n’est pas valable pour tous même si la recommandation de réduire ses apports caloriques en cas de prise de poids et de facteur de risque d’obésité reste totalement d’actualité.

Source

A.M.A. Recognizes Obesity as a Disease
ANDREW POLLACK
New York Times Published: June 18, 2013

Loss of Function of the Melanocortin 2 Receptor Accessory Protein 2 Is Associated with Mammalian Obesity
Masato Asai & al
Science 19 July 2013: Vol. 341 no. 6143 pp. 275-278

Crédit Photo Creative Commons by  FBellon

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